Nous sommes le vendredi 19 décembre 2014, je reçois un appel du secrétariat général de la mairie de Puteaux. “Bonjour M. Poézévara, nous souhaitons vous informer que nous avons reçu la démission de M. Vazia, et nous aimerions savoir si vous siégerez au Conseil municipal ce soir ?“. Et le soir-même, j’entre pour la première fois dans la salle du Conseil, un peu intimidé mais déjà avec des propositions à défendre. De 19h30 à 1h30, nous acterons notamment le choix de l’architecte de la future école des Bergères (dans laquelle vont mes enfants depuis cinq ans !), et nous nous élèverons avec Evelyne Hardy contre le projet d’intercommunalité délirant porté par la droite (Puteaux / Courbevoie / Asnières / Colombes / Argenteuil…). Il sera aussi question d’accorder la protection fonctionnelle à des élu·es de la majorité pour attaquer un élu d’opposition en justice, une habitude à Puteaux.
Dix ans ont passé depuis cette soirée, et je mesure le chemin parcouru… et surtout celui restant en parcourir ! En adoptant une démarche très procédurière à mon entrée au Conseil, j’ai obligé Joëlle Ceccaldi-Raynaud à réfléchir à deux fois avant de se montrer légère face à la loi, notamment en termes de démocratie locale. Bien sûr, beaucoup reste encore à faire, et chaque angle mort réglementaire est exploité jusqu’au ridicule. Nous sommes ainsi l’une des rares villes de notre taille à ne pas avoir de commissions de préparation des conseils associant l’opposition, les conseils eux-mêmes sont désormais prévus en journée et en semaine pour empêcher les élu·es bénévoles de travailler, l’opposition est systématiquement oubliée lors des événements municipaux… Sans compter les noms d’oiseaux lancés en conseil municipal et autres tentatives de vexations puériles. La majorité reste démocratiquement très immature, et le temps ne semble rien faire à l’affaire.
Sur le fond, malgré une opposition quasi-systématique de la majorité municipale (il a fallu attendre 2020 pour qu’elle commence à accepter de voter des voeux et propositions de l’opposition, un par conseil, pas plus), j’ai obtenu quelques victoires. Je pense notamment à la mise en place du quotient familial (désormais nommé coefficient d’effort) pour la cantine, une mesure que je réclamais depuis des années. Je pense également au dédommagement des habitant·es de la Défense lorsque leur fournisseur de chauffage a fait exploser les prix il y a quelques mois, sujet sur lequel je m’étais mobilisé avec le Printemps Putéolien. Je pense encore à la bataille culturelle autour de l’écologie, qui progresse très difficilement à Puteaux, mais à force d’insistance sur la végétalisation des espaces verts, la baisse de la hauteur des bâtiments et l’arrêt de la bétonisation, quelques lueurs d’espoir (très faibles, certes) pointent dans les décisions du conseil.
Parmi mes meilleurs souvenirs de ces dix ans de mandat, je conserverai les mails de remerciements des parents d’élèves du Conservatoire après que j’ai fait annuler une décision de la mairie quadruplant (!) le tarif annuel pour les non-Putéolien·nes. Ils avaient ainsi récupéré jusqu’à 600€ juste avant Noël. Et la vidéo du nouvel appartement, un logement social refait à neuf, d’une famille avec deux enfants qui vivaient dans un taudis de 12 mètres carrés et que j’avais accompagnée.
Au-delà des combats, je garde aussi de ces dix ans énormément de rencontres et des échanges avec des gens formidables, à commencer par les élues de mon groupe sur le premier mandat (quelle belle époque !), Evelyne, Olivier puis Nadine. Je pense évidemment à celles et ceux avec qui nous avons mené deux formidables campagne municipales, partielle en 2015 et bien sûr celle de 2020 avec le Printemps Putéolien, sans être exhaustif je pense à Anne, Martine, Jean-Michel et Jean-Michel, Patricia, Benjamin, Aurélien, Alexandre, Nicolas, Ywann, Katrin, David, Josette, Evelyne, Bernard, Laurent, Laura, Muriel, Arnaud, Helena, Emmanuel, Philippe… Et bien sûr j’ai une pensée pour la crème de la crème, celles et ceux qui sont là depuis longtemps et toujours présent·es dans cette ville où il est si compliqué d’être de gauche, Anna, Sylviane, Nadine à nouveau, Richard, Paul et Catherine !
A titre personnel, j’ai beaucoup appris de ces dix années, d’un point de vue technique (FSRIF, FPIC, CRFP… que du bonheur), d’un point de vue politique (les nuits de négociation, les batailles pied à pied avec la majorité pour faire progresser la situation des Putéolien·nes…), d’un point de vue humain (les amitiés, les trahisons, les ambitions…)… Mais le plus gros enseignement que je retire de cette période, c’est la résilience. Rester engagé même lorsque le combat semble vain, même lorsqu’il est compliqué à vivre (imaginez l’ambiance les soirs d’élection municipale à gauche à Puteaux…), même lorsque l’on se retrouve seul face à la meute (quatre ans déjà depuis 2020…). Tenir malgré tout, parce que c’est la seule manière d’espérer faire progresser les choses, parce qu’il faut porter la voix des habitant·es oublié·es de la mairie, parce que sans opposition le rouleau compresseur de la droite ceccaldiste les écraserait encore plus. Le nombre de militant·es et d’élu·es qui ont lâché après quelques mois en atteste : militer à gauche à Puteaux est compliqué sur la distance.
Néanmoins, après une phase très compliquée de 2017 à 2022 environ, je sens depuis deux ans un frémissement, avec de nouvelles personnes engagées, notamment des jeunes, qui apportent leur dynamisme et leur fraîcheur militante localement. J’ai hâte de voir dans les années qui viennent où tout cela nous mènera, et je suis très enthousiaste à l’idée de leur transmettre le flambeau ! Notre ville a un potentiel incroyable, une belle endormie qui j’en suis convaincu finira par se réveiller et mettre à profit sa richesse pour améliorer le quotidien de ses habitant·es.
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